©Sophie Bosselut, Dragibus – Lacryma, alias “la Vallée des Larmes”, 2022

Du 8 juin au 20 juillet 2024, la galerie Art Now Projects de Carouge présente l’exposition « Le pays des larmes » de Sophie Bosselut, artiste plasticienne française. Installée depuis quelques années dans les hauteurs de Lausanne, près de la source du Flon, l’artiste s’inspire notamment des éléments naturels qui l’entourent, et particulièrement de l’eau, élément central de son art. L’art comme libération de l’esprit et des états d’âme, Sophie Bosselut témoigne de ses pensées d’artistes et de femme à travers divers médiums artistiques tels que la peinture, la céramique et la vidéo. Pour cette exposition, l’artiste met en avant l’exploration de son intérieur propre, du monde qui la traverse, en entremêlant l’imaginaire, le souvenir et le rêve. Son art, porté par l’émotionnel et le spirituel, nous entraîne instantanément dans un univers onirique, fantastique et sensoriel en perpétuel mouvement.

La peinture, une évasion vers un univers parallèle

De nombreux artistes utilisent l’art comme un moyen de se libérer du quotidien, angoissant et oppressant. Chacun, peut ressentir, à un moment de sa vie, le besoin d’échapper à une réalité physique et matérielle dans laquelle il se sent piégé, prisonnier, voire enchaîné, sans aucun moyen de s’évader. Dans ces situations, l’imaginaire prend souvent le relais et devient un don sacré, une manière de s’extirper de ce monde aux couleurs ternes, permettant d’oublier, ne serait-ce qu’un instant, cette peine devenue insurmontable. Sophie Bosselut, fait de son art un refuge, un univers réconfortant qui lui permet d’exprimer, de ressentir et de questionner son monde intérieur. Plongée dans un état méditatif, proche de la transe artistique, l’artiste laisse ses émotions les plus profondes s’exprimer sans retenue. Corps, cœur et esprit réunis, son individualité s’élance avec force sur la toile, et ses pensées se déversent par centaines à travers ses pinceaux.

Sensible à la notion d’introspection, l’artiste présente Les Mondes engloutis, une œuvre qui explore la complexité de l’être et le cheminement personnel de chacun. Au premier plan, une multitude de racines recouvrent la toile, dissimulant un ailleurs mystérieux. En observant plus profondément, les racines deviennent les veines d’un monde souterrain, reliant la surface aux profondeurs cachées de notre psyché. Ainsi, elles symbolisent les liens invisibles qui nous unissent à notre passé, à nos souvenirs et à nos émotions les plus enfouis. Chaque filament semble vibrer d’énergie, comme si l’œuvre elle-même respirait au rythme des expériences humaines. Sophie Bosselut nous invite à plonger dans les abîmes de notre inconscient, en explorant les mondes engloutis de notre esprit où résident nos rêves, nos peurs et nos espoirs. L’œuvre nous rappelle que la vie est un voyage intérieur, où chaque expérience enrichit notre être et où chaque racine, ancienne ou nouvelle, contribue à notre croissance.

La céramique, une métaphore des fêlures de l’être

Récemment, Sophie Bosselut s’est initiée à la céramique, un art ancestral qui réunit les quatre éléments : feu, air, eau et terre. Ce médium, délicat à travailler, reflète la fragilité de l’être humain – un simple faux pas peut entraîner une brisure définitive. Cependant, Sophie Bosselut ne cherche pas à créer des pièces parfaites et sans défaut. Au contraire, elle célèbre leurs « imperfections » et dévoile toute leur authenticité. Oripeaux, un monde éclaté met en lumière les fêlures de l’être – les cicatrices et les blessures profondes ancrées en chacun de nous. Ces morceaux de céramique, fièrement accrochés au mur, ne sont plus des fragments à cacher, mais deviennent les témoins des expériences passées, des essais et des apprentissages de l’artiste. L’œuvre devient ainsi, une ode à la résilience humaine, illustrant nos capacités à transformer les épreuves de la vie en une source de croissance et de puissance personnelle.

Lors d’une discussion avec Frédéric Elkaïm, Sophie Bosselut a évoqué l’importance des pleurs comme marqueurs des différentes étapes de l’existence – larmes de joie, de tristesse, de déception ou d’accomplissement. Les larmes considérées comme des alliées indispensables, permettent à chacun de se libérer des maux enfouis. Ainsi, sa série Lacrymal Ostensoir tisse un lien puissant entre l’individualité de l’artiste, la nature qu’elle chérit et la liberté artistique de ses émotions. Chaque pièce de cette série représente une larme, à travers laquelle se manifeste un flux énergétique particulier, exprimé par des mots, des phrases et des symboles variés. Ces douze pièces, aussi singulières que collectives, reflètent des moments particuliers de la vie de l’artiste. Par le mouvement oscillant de la peinture sur le grès, ces œuvres s’unissent comme un fleuve de mots et de pensées, devenant des reliques réconfortantes et sacrées.

©Sophie Bosselut, Série Lacrymal Ostensoir, 2023

Finalement, en explorant une vaste palette de médiums artistiques, Sophie Bosselut se livre à cœur ouvert avec une sincérité profonde et transforme chacune de ses toiles en une source d’éveil et de libération. Ressentir pour mieux guérir, accepter pour mieux rebondir : l’artiste illustre la puissance de l’art à exprimer ce que les mots ne peuvent dire. Ainsi, « Le pays des larmes » nous entraîne au cœur de ses réflexions les plus intimes et nous invite à notre tour, à entreprendre un voyage intérieur profond, à la découverte de nos propres rêves, de nos blessures et de nos aspirations enfouies.

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